Dans cette vidéo extraite d'un prêche, le cheikh Adnan critique le discours dominant auprès des théologiens, qui considère que l'apostasie est passible de mort en islam. Selon lui, les versets qui traitent d'apostasie évoquent un châtiment dans l'au-delà, et non dans cette vie. Aussi, si le Prophète voulait appliquer la peine de mort sur les apostats, il l'aurait fait avec les hypocrites - qui étaient en vérité des incroyants - dont il connaissait la mécréance.
Le cheikh Adnan Ibrahim est à la fois un intellectuel et un imam dont la spécificité tient à une articulation réussie d'un savoir encyclopédique en sciences islamiques et d'une connaissance fine de productions intellectuelles occidentales. Bien qu'il s'adresse prioritairement à un public résidant dans des pays musulmans, sa pensée est d'un grand renfort pour les débats occupant les musulmans vivant en Occident.
jeudi 29 novembre 2012
L'apostasie est elle passible de mort en Islam?
lundi 17 septembre 2012
A propos du film blasphématoire "l'innocence des musulmans"
Cette vidéo est extraite du premier prêche annonçant le retour de cheikh Adnan Ibrahim, le 14.09.2012, après une période de convalescence. Dans ce prêche qui s'intitule "Le monde et nous... guerre ou paix?", le cheikh Adnan Ibrahim discute de la perception de la relation entre les musulmans et les non-musulmans, héritée des productions juridiques des jurisconsultes musulmans à travers les siècles, ce qui demande de revenir sur le fameux "verset de l'épée" de la sourate al- Tawba. Mais dans cette vidéo, extraite de ce prêche, il revient sur l'actualité, à savoir le film blasphématoire qui s'attaque au Prophète sws, et sur les réactions des musulmans qui l'ont suivi.
lundi 23 juillet 2012
Grandeur de l'âme
Cette vidéo est courte mais pleine de sens...
mardi 3 juillet 2012
L'islam et la tolérance
samedi 9 juin 2012
Quel rapport entretient l'islam avec l'altérité religieuse?
Dans cette vidéo, le cheikh Adnan explique le rapport que l'islam
entretient avec les autres religions: chrétiens, juifs, zoroastriens,
mais aussi avec les non croyants. Il déconstruit certaines conceptions
qui attribuent à l'islam une visée belliqueuse et explique comment la
tolérance et l'ouverture ont toujours accompagné cette religion tout au
long de son histoire.
mardi 1 mai 2012
L’obéissance… Ou la racine de la corruption
et de la tyrannie
Chers frères, chères sœurs,
Les étants naturels empruntent les
chemins les plus faciles. Ils n’ont ni ambition ni résistance. Par exemple, si
un obstacle fait obstruction à un cours d’eau ruisselant, ce dernier va illico
presto s’en écarter pour emprunter le chemin le plus facile. Seul l’homme
constitue une exception à la règle, ce qui fait de lui un phénomène
extraordinaire : bien qu’il ait un côté naturel - à savoir son corps,
assujetti aux phénomènes naturels -, sa composante principale relève du domaine
surnaturel « Quand Je lui aurai insufflé de Mon Esprit » (Coran,
Sâd : 72). C’est pour cela que cet être paie le prix de ses ambitions et
de ses aspirations, étant donné qu’il marche dans le sens inverse de l’attraction
- non seulement de l’attraction planétaire, mais aussi de l’attraction des
passions et des penchants de son âme -, et ce,
en vertu de la responsabilité qui lui a été confiée : celle de la
liberté, la liberté de choisir.
« Alors que se soumet à Lui, bon
gré, mal gré, tout ce qui existe dans les cieux et sur la terre, et que c’est
vers Lui qu’ils seront ramenés » (Coran, âl- ‘Imrâne : 83). Dans ce
verset, il est dit que les humains se soumettent à Dieu de bon gré, tandis que
le reste des étants naturels cosmiques se soumet à Lui malgré eux. L’homme
choisit de s’imposer à lui-même des contraintes que la coutume ou la religion
ont dessinées et qu’il trouve agréables, car elles vont dans le sens de son
intérêt (en ce sens qu’elles le guident et lui procurent du bonheur). C’est ce
qu’on appelle l’autocontrôle qui ne contredit en rien la liberté, c’en est même
l’essence.
Certaines personnes envient les tyrans
parce qu’ils font ce qu’ils veulent, sans s’assujettir à une quelconque autorité,
que ce soit celle de la religion ou de la conscience. Mais une analyse fine
montre qu’ils ne sont pas libres : en effet, le tyran commence par perdre
sa propre personne. Platon (428 – 347 av. J.C) a qualifié le tyran de «
Grand animal ». Le grand tyran est un grand animal en fait, qui plonge au
plus profond de son animalité à mesure qu’il plonge dans sa tyrannie.
L’obsession du tyran de devenir un dieu le pousse toujours en fin de compte à
se transformer en un animal sauvage. Mais ceci ne peut être compris que si l’on
comprend l’essence de la liberté.
Hegel (1770 – 1830) a traité de l’état
naturel - ce que nous appelons nature originelle, « Fitra ».
Jean-Jacques Rousseau (1712 - 1778) fit, à l’instar des romantiques, l’éloge de
cet état naturel. C’est la raison de leur volonté d’explorer des sociétés
primitives et d’étudier l’homme primitif - à savoir la condition initiale de
l’homme avant la constitution des sociétés et des Etats-, car la société et
l’Etat signifient plus de contrainte et plus de contrôle. Hegel a montré que l’état naturel est un mélange de violence, de brutalité et
d’absence de contrôle sur les passions et sur les instincts. Il a expliqué
qu’il n’est possible d’appréhender la liberté,- qu’elle soit individuelle ou
collective-, qu’en saisissant les contraintes que la société ou l’Etat
instituent. C’est cela le sens de l’autodétermination. C’est d’ici que vient
cette citation : « L’essence de la liberté est l’autodétermination ».
Mais pour simplifier et expliquer, je
dirais que toute activité humaine a deux composantes : une forme et un
contenu. L’écriture a une forme et un contenu, le football aussi, le prêche
également, ainsi en est-il de la liberté, de l’alimentation, de l’habillement,
etc. L’essence de toute chose est dans son contenu et non dans sa forme. Par
exemple, l’écriture qui est vidée de son vrai fond n’est rien d’autre qu’un
amas de phrases, une pléthore de mots dénués de tout sens.
La liberté aussi a un contenu et une
forme. Sa forme peut être définie sous l’angle de la théorie des possibilités.
Considérée sous cet angle, la liberté signifie la possibilité de faire tout et
n’importe quoi. Mais qui peut soutenir que c’est cela la liberté ? Quant
au contenu de la liberté, il ne peut être défini que de manière circonscrite
dans un domaine donné, et selon des concepts et des valeurs précis.
Si cette limitation émane de ma propre
volonté et de mon accord, ceci ne contredit pas la liberté, c’est même
l’essence de la liberté. Exemplifions : nous sommes des habitants d’un même
quartier, et nous remarquons que la signalisation des feux de circulation à un
carrefour donné ne fonctionne pas correctement, fait qui cause nombre
d’accidents. Nous proposons, de concert, à la Commune, d’installer de nouveaux
feux de signalisation. Ce qui arrive après cela, c’est que nous nous conformons
à la nouvelle signalisation sans sentir qu’elle limite notre liberté le moins
du monde, car notre liberté s’est cristallisée au gré de notre volonté.
Sur base du principe selon lequel la
liberté serait une forme d’autolimitation, Montesquieu (1689- 1755) a défini la
liberté, dans L’esprit des lois, comme étant l’obéissance aux lois.
En conséquence, l’être ne relève point de contradiction entre son sentiment
profond de jouir de sa liberté, - bien qu’il soit limité par les lois
religieuses -, et les valeurs et normes sociales qui trouvent sens à ses yeux,
« Montre-toi indulgent, ordonne ce qui est conforme à la coutume »
(Coran, al- A‘râf : 199).
J’ai mentionné les lois religieuses
pour signaler que lors de l’établissement des grands principes, comme celui des
Droits de l’Homme, on a besoin de baser notre construction sur des fondements
supérieurs, car il est difficile de baser de tels principes sur des fondements
immanents.
J’ai avancé ces quelques éléments en
guise d’introduction à ce que je considère être la racine de la plupart de nos
problèmes politiques et sociaux. Seuls quelques rares intellectuels distinguent
les conceptions qui conditionnent l’individu ou la société de leurs expressions
et manifestations. Et, parmi ces conceptions qui nous gouvernent, il y a
l’obéissance qui est synonyme d’un côté de sujétion et de subordination, de
l’autre de domination et d’oppression. Je parlerai donc de la propension à
l’obéissance, ou mieux encore d’obédience, à savoir le fait de pratiquer
l’obéissance et de la percevoir comme étant la cime des vertus, la valeur
suprême et le comportement idéal. Or, il va sans dire que cette obédience n’a
rien à voir avec l’obéissance que Dieu swt et Son Envoyé nous ont commandée, et
qu’elle ne constitue que ce que les despotes et les tyrans prescrivent pour
faire perdurer la situation de subjugation et d’asservissement.
Il est de notre droit de nous demander,
avec vigueur : comment peut-on nous priver de ce dont Dieu nous a honorés-
en nous offrant la liberté de Lui obéir ou de contrevenir à Son ordre et à Ses
interdits ?- « Nous l’avons guidé dans le chemin, - qu’il soit
reconnaissant ou ingrat – » (Coran, al- Insân : 3). « Et par
l’âme et Celui qui l’a harmonieusement façonnée; et lui a alors inspiré son
immoralité, de même que sa piété! » (Coran, al- Shams : 3).
L’harmonie ne signifie pas ici un comportement angélique. En effet, nous autres
humains ne pouvons trouver une harmonie que dans cette contradiction opposant
la licence et la piété. Aussi, notre humanité se manifeste dans la façon
dont nous élisons notre voie, nos idées et nos valeurs entre tous les
antagonismes et toutes les alternatives qui s’offrent à nous,- élection ô
combien pénible! Notre vie spirituelle étant traversée par des doutes, des
parasitages, des questionnements, des polémiques, des progressions et des
stagnations, des mutations et des concessions. Toutefois, ceci témoigne de la
grandeur de l’homme, laquelle l’a qualifié à être le maître de cet univers et
le vicaire de Dieu sur Sa terre. Combien est formidable cette citation de
Tagore : « Je crois en Dieu parce qu’Il m’a donné la liberté de
mécroire en Lui ! ».
Mais la société et la culture : le père,
la mère, le professeur et le cheikh, le gouverneur et le souverain, l’écrivain,
le poème, le roman, le proverbe, tous essaient de nous priver de cet honneur et
de nous faire croire qu’il ne faut pas réfléchir parce qu’ils réfléchissent à
notre place, et qu’il ne faut pas choisir puisqu’ils ont choisi pour nous.
Cependant, évidemment, ceci ne constitue
pas le dessein de Dieu lorsqu’Il honora l’homme et qu’Il le désigna comme
vicaire sur terre. C’est plutôt la stratégie des despotes. Quiconque essaie de
te duper à propos de cette vérité est un sbire des tyrans. Et même si ces
derniers le disgracient, le torturent, il restera leur serviteur. Ce genre de
sbires entérinent un certain état d’esprit et prêtent main forte à une
conception sociale qui écrase l’individualité de l’homme et sa singularité, si
bien que l’individu devient incapable de se penser comme un être indépendant
qui a ses propres choix, ses propres capacités, - car chacun de nous est un
univers. D’aucuns ont dit : « Le facteur commun entre les humains est
le fait qu’ils soient différents, et ce qui les distingue le plus est leur
diversité ». C’est pour cela que même si ce type de personnes s’oppose à
un tyran, ce sera pour le faire remplacer par un autre. Aussi veulent-ils faire
de nous des esclaves au-dessus desquels se succèdent des maîtres au nom de la
religion, de la Nation, etc.
Dans nos sociétés, nous ne trouvons
personne pour nous parler de nos personnes, non en tant que communauté ou
peuple, mais en tant qu’individualités : de moi, de toi, de lui. Notre
individualité est dissoute dans l’ensemble, notre identité est l’identité de
l’ensemble, nos choix sont les choix de l’ensemble : nul n’a d’existence
en dehors de l’ensemble. Ceci perpétue les conditions propices à l’obédience.
Dans le Livre de Dieu et la Sunna de Son
noble Envoyé, l’obéissance n’a rien à voir avec la subordination : elle
signifie le libre choix. Etymologiquement parlant, le terme obéissance « Tâ‘a »
veut dire accepter d’être mené de plein gré « Son âme l’incita à tuer son
frère » (Coran, al- Mâ’ida : 30), « Et si quelqu’un fait plus de
son propre gré, c’est pour lui » (Coran, al- Baqara : 184). Il s’agit
donc de s’imposer une chose qui n’est pas exigée de soi a priori, mais
que l’on fait de manière volontaire. Jarîr ibn ‘Abdullâh nous rapporte cet
échange avec le Prophète sws: « - Je fais acte d’allégeance au Prophète
sws en m’engageant à écouter et à obéir. - Dans la mesure de tes possibilités,
me dit-il, et à donner conseil à tout musulman»[1]. Par ailleurs,
‘Abdullâh b. ‘Umar a dit : « Nous faisions allégeance au Prophète sws
en nous engageant à écouter et à obéir, et il nous précisait : dans la
mesure de vos capacités »[2]. Il est donc
évident que, dans la perspective islamique, l’obéissance ne peut cohabiter avec
la contrainte et qu’elle en est l’opposé absolu.
Mais comment se fait-il qu’on comprenne
l’obéissance comme étant la soumission à une domination ? Dire oui alors
qu’on n’est pas convaincu n’est en rien de l’obéissance, c’est plutôt de la
subordination et une aliénation de l’individu, qui fait, en fin de compte,
qu’il ne vaut pas plus qu’un chiffre, qu’un membre du troupeau. Or, ceci est la
meilleure chose que l’on puisse offrir au tyran pour qu’il se divinise et
s’enfle davantage d’orgueil. C’est pour cela que la cause principale d’un tel
état des choses n’est ni l’injuste, ni son régime, mais bien moi, toi, le père,
la mère, la maison, l’école, la mosquée et l’université : c’est nous qui
préparons au tyran le troupeau d’équidés à monter et le troupeau de brebis à
sacrifier. Homère (VIII ème siècle. av. J.-C) appelait les despotes
« dévoreurs des peuples ».
Dans la psyché du tyran, rien n’existe à
part son propre ego, comme dit une fois Muhammad ‘Abduh à propos de Muhammad
‘Alî Bâsha : « Cet homme ne tolère en Egypte aucune altérité si ce
n’est son ego ». Tous les tyrans à travers les siècles n’ont foi qu’en
eux-mêmes. Il n’y aurait qu’un seul ego et une seule personne, le reste
n’étant, pour eux, qu’un troupeau. Il est vrai, concèdent-ils, qu’il existe des
femmes, des hommes, des artisans, des savants, mais ils sont toujours conçus
comme un ensemble. Rien n’attise plus la colère du tyran qu’un nom qui se
distingue, serait-ce dans le domaine du football : un joueur dont les
masses clament le nom serait une atteinte à la divinité et à l’unicitude
du tyran.
Ce qui précède explique nombre de choses
qui nous paraissent très différentes lorsqu’elles sont abordées à l’aune de
l’interprétation que nous proposons ici. Par exemple, pourquoi ne nous
respectons-nous pas les uns les autres ? Beaucoup de ceux qui montrent du
respect aux autres le font par servilité et opportunisme - si la personne
respectée détient de l’autorité au niveau ministériel par exemple. Cette
servilité peut atteindre la servitude. Or, la différence entre le respect et la
servilité est aussi grande que celle entre la liberté et la servitude. Et si la
personne respectée est ordinaire, ce respect est souvent de l’opportunisme,
pour la duper dans ses biens, sa famille ou autre chose. Le Prophète sws a
dit : « Et les gens du Feu sont de cinq sortes… et un homme qui,
matin et soir, essaie de te duper dans ta famille et tes biens »[3].
Et selon Abû Jubayra b. al-
Dahhâk : « Quand le Prophète rrr émigra à Médine, il n’y avait pas
d’homme parmi nous qui n’avait pas deux ou trois qualificatifs ; à chaque
fois que l’un de nous était appelé par l’un de ces qualificatifs, on disait au
Prophète sws : « Ô Prophète, cela le contrarie ! ». C’est
la circonstance de révélation de ce verset : « et ne vous lancez pas
mutuellement des sobriquets (injurieux) » (Coran, al- Hujurât : 11)[4]. Il ne
convient pas d’appeler quelqu’un de ton âge : « garçon ! »,
ou « mon enfant ! ». Le Prophète rrr appelait ‘Alî « Ô frère ! » alors qu’il
n’avait pas encore atteint la vingtaine. C’est ainsi qu’il appelait aussi
Mu‘âdh Ibn Jabal, qui est décédé à l’âge de trente-trois ou trente-quatre ans.
Aussi, Mâlik ibn Anas avait un petit frère alors âgé de cinq ans, le Prophète
sws avait l’habitude de lui donner un surnom et de lui dire : « Ô Abû
‘Umayr, qu’a-fait le Nughayr »[5]. Il l’appelait
ainsi pour lui donner de l’estime de soi, par respect envers sa personne.
Ce que je veux dire est qu’il est
impossible à celui qui ne se respecte pas soi-même de respecter les autres.
Quand celui qui ne se respecte pas soi-même montre du respect aux autres, il le
fait par opportunisme et arrivisme, ou bien par crainte et servitude, tandis
qu’il s’enfle d’arrogance et d’outrecuidance à l’égard de ceux qu’il estime
en-deçà de son niveau : il les traite avec dureté, les opprime et se
comporte avec eux de manière indigne, que ce soit du point de vue de la
convenance ou de la religion.
Ainsi l’homme perçoit-il les autres à
l’aune de son propre prisme, car il n’est pas possible de percevoir les autres
avec un autre prisme que le sien. Bakr ibn ‘Abdullâh al- Muzanî a dit :
« Si tu veux voir quelqu’un qui regorge de défauts, cherche un persifleur.
Celui-ci ne critique chez les autres que ses propres tares : il sait qu’il
est menteur et il s’imagine que tous les gens sont menteurs ; il est
convaincu de sa déloyauté, ne fait confiance à personne et s’imagine que tous
sont déloyaux comme lui ». Abû al- Tayyib al- Mutannabî a exprimé cette
nuance en disant :
Lorsque les actes de l’homme sont
mauvais, ses présomptions le deviennent aussi,
Si bien qu’il finit par croire aux
illusions auxquelles il s’est habitué
Il déclare son inimitié à ses proches se
basant sur les dires de ses ennemis
Et plonge ainsi dans une nuit sombre de
doute
Le phénomène de respect peut également
être interprété à la lumière de la période d’enfance : la clef de nos
énigmes est dans notre enfance, notre passé, et non dans nos paroles, ou notre
aspect extérieur. Celui qui manque de respect envers les autres le fait parce
qu’il manque de respect vis-vis de lui-même en fait : il oscille entre la
peur et la colère. Ou bien a-t-il peur des autres ou bien est-il en colère
contre eux. Le Prophète sws a dit : « C’est celui qui dit que les
gens ont péri qui a le plus péri »[6]. Il peut
arriver à tout un chacun de faire la rencontre de personnes dont il admire la
générosité, la sincérité, la spontanéité, la bonté, et la haute moralité. Mais
il est des personnes qui ne voient chez les autres que des défauts et des
tares. Le problème de celles-ci prend source dans leur enfance. La peur et la
colère sont deux manifestations de la subordination et de l’oppression. Celui
qui est opprimé vit constamment dans la peur et la colère, parce que l’on exige
de lui qu’il se comporte d’une façon contraire à la vraie nature dont Dieu l’a
doté. Celui qui ne respecte pas les autres n’était pas respecté lorsqu’il était
encore enfant. On ne l’appelait pas par de petits noms affectueux, et lorsqu’il
commettait une erreur, il en entendait des vertes et des pas mûres. Quel crime
fait-on à nos enfants ! C’est de cette façon que nous fabriquons des
tyrans et que nous leur préparons des esclaves. Nous fabriquons de la servilité
mesquine d’un côté, et de la rébellion dévastatrice de l’autre.
Ceci explique certaines catastrophes qui
frappent nos pays : ou bien une soumission servile, ou bien des explosions
et des attentats, mais pas le juste milieu ! (Je parle, de toute évidence,
de la situation générale dans ces pays). Tout cela advient parce que ces
sociétés sont opprimées et privées de crédibilité, de créativité, de liberté,
de ces choses que l’on peut résumer en un seul mot : l’indépendance. Aide
la personne à être indépendante et tu la verras libre, créative et
sincère ! Tel est le bon départ. Un homme influant dans son pays m’a
raconté un jour une anecdote : son oncle le frappa devant tout le monde
alors qu’il était marié et avait plusieurs enfants. Il réagit en embrassant la
main de son oncle sans émettre le moindre commentaire. Quelles sociétés
folles ! Des sociétés qui ont perdu leur bon sens et leur raison. On se
complait à attribuer ce genre d’attitudes à la religion ou à la convenance
alors qu’en vérité elles témoignent d’une confusion des choses, d’un tohu-bohu
qui fait perdre tout sens aux choses.
A l’inverse, la Sira nous raconte
l’histoire de Sawwâd ibn Ghaziyya. En effet, le Prophète sws, alors qu’il était
occupé à aligner les rangs le jour de la bataille de Badr, le trouva mal aligné.
Le Prophète sws le frappa sur son ventre avec son bâton et lui demanda de
regagner le rang. Celui-ci répondit : « Ô Messager de Dieu !
Dieu t’a envoyé avec la vérité et la justice, tu m’as fait mal, alors
laisse-moi me rendre justice à moi-même! ». Le Prophète sws découvrit son
ventre et lui demanda de rendre justice à lui-même. Toutefois, Sawwâd se
jeta sur le Prophète sws, le serra et embrassa son ventre. Quand le Prophète
sws lui demanda ce qui l’avait poussé à agir ainsi, Sawwâd répondit :
« Ô Envoyé de Dieu ! On se prépare à affronter l’ennemi, comme tu
vois. Et je veux que le dernier souvenir que j’aurai de toi soit le fait que ma
peau ait touché la tienne ! », et Sawwâd de recevoir les prières du
Prophète sws.
Si l’on examine le fonctionnement d’une
école, on remarque que les professeurs se comportent de manière oppressante
envers leurs élèves ; cependant qu’eux-mêmes demeurent assujettis aux
livres établis par le programme. L’enseignant se borne à inculquer un maximum
de choses à ses élèves. Paulo Freire (1921 – 1997) a appelé cette manière
d’enseigner « Éducation bancaire ». Le livre est pris pour un Livre
Saint, tandis que l’enseignant ressemble plus à un prêtre qui l’enseigne. Aucun
écart n’est toléré par rapport au texte, nul questionnement n’est permis. De
surcroît, l’élève est réprimé par l’enseignant, ce dernier étant lui-même
réprimé par le directeur de l’école, celui-ci étant à son tour réprimé par
l’inspecteur, et ainsi de suite.
Lors de la construction de l’Université
du Caire, Cromer (1841 – 1917) - le Régent britannique en Egypte de l’époque-,
disait ceci : « Nous devons respecter les particularités du peuple
égyptien en matière d’éducation, car l’enseignement chez eux est mémorisation
et apprentissage, et ceci doit demeurer inchangé ». Pas de réflexion, de
débat, ou de critique. Il ne fait pas de doute que les colonisateurs savent les
avantages de ce système éducationnel pour le colonialiste.
Pour désigner la plus haute
autorité, nous parlons du chef de l’Etat[7]. Et combien la
langue peut être moqueuse ! Le chef est pour l’Etat ce qu’est la tête pour
le corps : il est la plus haute autorité, tout comme la tête loge en-haut
du corps et abrite le cerveau. Le chef d’Etat serait donc censé réfléchir pour
nous et à notre place : il n’est pas comme nous. Si nous comparons ce
genre de chefs d’Etat au Prophète sws, nous réalisons que le Prophète sws se
considérait comme un membre de sa communauté. « Et moi, je dois ramasser
des rameaux de bois » disait-il une fois à ses compagnons. Il était très
contrarié si ces derniers se levaient de leur place pour le saluer et leur
interdisait cela formellement : « Celui qui aime que les gens se
lèvent pour le saluer, qu’il s’attende à trouver sa place en Enfer »,
disait-il. Il prenait lui-même ses affaires avec ses mains et refusait que l’un
ou l’autre compagnon le fasse et disait : « Il revient plus au
propriétaire de prendre ses affaires ». Aussi, il rapiéçait ses chaussures
et raccommodait ses habits et aidait dans les tâches ménagères. Malgré cela, il
disait à ses compagnons : « Je ne m’estime guère favorisé sur
quiconque, si ce n’est par la prophétie ». Il ne se distinguait
effectivement d’eux ni dans sa façon de s’habiller, ni par une place
particulière dans ses assemblées, car il s’installait là où il trouvait une place,
si bien que lorsque des étrangers venaient le rencontrer, ils ne le
reconnaissaient pas entre ses compagnons.
Un autre phénomène déplorable que l’on
relève dans notre réalité, est celui qui a trait à la punition générale, que ce
soit dans nos foyers, à l’école ou autre. Il suffit que quelqu’un fasse une
faute, et voici que l’ensemble est puni. Certains justifient cette injustice en
citant le faux adage qui dit que la bonté [divine] est personnalisée tandis que
lorsque la punition vient, elle frappe l’ensemble ! Il n’est pas étonnant
que cette mentalité sévisse dans des sociétés qui ne croient pas en
l’individualité de l’être et en son indépendance, qui continuent à considérer
les individus comme membres d’un troupeau.
Comme ceci est loin de la parole de Dieu
swt ! « Nul ne portera le fardeau d’un tiers » (Coran, al-
An‘âm : 164). Même Dieu ne s’est pas donné cette prérogative, de punir le
groupe pour les erreurs d’un ou deux individus. Ceci est l’injustice dont Dieu
swt s’est purifié « Toute âme aura à assumer le poids de ses œuvres »
(Coran, al- Muddaththir: 38). Et au lieu de conformer leurs actes au Coran,
certains mentent sur Dieu en lui attribuant un prétendu hadith Qudsi où Il
aurait dit : « Je suis satisfait quand Je suis obéi. Quand Je suis satisfait,
J’apporte ma bénédiction. Ma bénédiction n’a pas de limites. Mais lorsque Je
suis désobéi, Je me courrouce. Et lorsque Je suis en colère, Je maudis. Ma
malédiction frappe la descendance jusqu’à la septième génération! »[8]. Or ceci est
un mensonge forgé de toutes pièces ! Ceux qui ont fabriqué cette tradition
se sont-ils demandé qui étaient ‘Ikrima ibn Abî Jahl et ‘Umar ibn al- Khattâb,
et qui étaient leurs parents ?
L’être opprimé sera ou bien un esclave
mesquin, ou bien un despote. Très mince est sa chance de vivre de manière
saine, sans commettre l’injustice ou la subir, sans être ni victime ni
bourreau.
Dans ce genre de conditions d’obéissance
qui prédominent dans nos institutions sociales -qu’elles soient matérielles ou
symboliques-, les choses finissent par perdre leur sens : ainsi en va-t-il
de l’amour, de l’amitié, du mariage, de la loyauté, de la fidélité, de la foi,
de la noblesse, de l’honneur, de l’engagement, etc… Les tyrans pensent se
dispenser de ces valeurs, car la façon dont ils se perçoivent eux-mêmes et dont
ils perçoivent les autres les en prive. L’esclave n’arrive pas non plus à
saisir le sens de ces vertus car celles-ci naissent et se développent hors des
relations de tyrannie/servitude. En effet, l’amour, l’amitié, la loyauté, la fidélité,
etc. ne prennent vie et sens que dans une relation équilibrée.
Ceci nous aide à comprendre la vitesse
et la manière dramatique avec lesquelles nos relations se brisent, bien que
certaines aient duré dix ou vingt ans. En effet, elles représentent en vérité
des relations d’asservissement, entre un maître fort et dominant et un esclave
faible et dominé. Et bien évidemment, le maître peut congédier son esclave à
n’importe quel moment, tandis que le souci qui hante continuellement l’esclave
est d’échapper à son maître. L’honneur, la parole, l’engagement, l’amitié et
l’amour du réprimé n’ont aucune valeur, pas plus que ceux du despote.
Je voudrais conclure par cette question
importante : Quel est le poids, aux yeux du tyran, d’une ou de deux
personnes libres qui sèment le trouble? Il peut facilement les mettre dans les
geôles ou les traîner à la guillotine ! Mais que peut-il faire face à dix
millions d’hommes et de femmes libres ? On devrait plutôt poser la
question en ces termes : « Que peuvent-ils faire de lui ? ».
En définitive, la balle est dans notre
camp. Posons-nous donc la question de la liberté : comment faire naître
des êtres libres, indépendants et responsables ? Si vous trouvez la bonne
réponse, vous avez réponse à toutes les questions.
Et louange au Seigneur des mondes.
[1] Rapporté par al- Bukhârî et de
Muslim.
[2] Rapporté par al-Tirmidhî dans
son Jâmi‘.
[3] Rapporté par Muslim dans son
Sahîh.
[4] Rapporté par Ahmad et Abû
Dâwûd.
[6] Rapporté par Muslim.
[7]
Littéralement,
la tête de l’Etat. Ndt.
[8] Ceci est en vérité une tradition
israélite forgée, recensé par Ahmad dans al- Zuhd d’après Wahb ibn
Munabbih, comme quoi Dieu s’est adressé en ces mots aux fils d’Israël.
mardi 10 avril 2012
La purification de l'âme
Dans cet enregistrement, le cheikh Adnan Ibrahim nous met en garde contre le danger d'associer d'autres divinités à Dieu dans l'adoration. Or, l'homme n'associe pas de plus grande divinité, à Dieu, dans l'adoration que son propre ego. C'est pour cela qu'il importe de veiller à purifier ses actes de toute ostentation et de toute recherche vaine de satisfaire autre que Dieu. Cet état spirituel ne devient possible que dans la proximité de Dieu.
lundi 9 avril 2012
Ce qu'en disent les savants
- L’honorable savant, le docteur Muhammad Sa‘îd Ramadân al- Bûtî, que Dieu le garde, a dit :
« En Autriche et en Allemagne, je suis fier de
cet homme qui défend l’islam. Il soumet les cultures et les connaissances et
fait d’elles des soldats de Dieu et des preuves évidentes de la vérité avec
laquelle Dieu a envoyé les Prophètes et les Messagers. Pour être honnête, je
n’ai jamais rencontré avant aujourd’hui, malgré mes nombreuses visites des pays
européens, un islam pareil à celui que Dieu a prodigué à ce pays. Comme cheikh
Adnane l’a dit dans son discours, la science seule ne compte pas pour moi - car
nombreux sont les savants - tant qu’elle n’est pas couronnée de sérénité,
d’humilité et de sincérité envers Dieu. Que ce soit en Europe ou dans le monde
Arabe, je n’ai rencontrée une telle érudition chez aucune personne d’un âge
semblable, un savant encyclopédique. Cela dit, ce qui a le plus empli mon cœur
d’estime pour lui, c’est son altruisme… »
« … Lorsque j’ai eu l’honneur de visiter les
frères il y a deux ans, je me suis réjoui de la situation des musulmans, notamment
ceux vivant en Occident tant qu’ils ont parmi eux des personnalités telles que cheikh
Adnane. Dieu l’a doté d’une multitude de connaissances qu’il a toutes utilisées
pour la religion de Dieu. Je rends grâce à Dieu pour cela, et pour avoir gratifié
les gens de ce pays du cheikh Adnan pour les guider vers Dieu … »
« … J’ai toujours dit que celui qui appelle à
Dieu porte un lourd fardeau qu’il lui incombe d’accepter, car tel est son destin,
telle est la volonté de Dieu. Mais je me demandais s’il existait une personne
pareille, réunissant un tel niveau de culture pour stimuler la prédication de
la plus belle des manières. Je cherchais vainement, jusqu’à ce que je rencontre
une personne réunissant ces qualités il y a deux ans. Ce qui fait chaud au cœur
est que le cheikh Adnan a mobilisé toutes ces connaissances dont Dieu l’a gratifié
au service de la religion de Dieu. Il est des gens possédant de grandes
connaissances en Astronomie, en Histoire, en Histoire des sciences naturelles,
en Zoologie, en Ingénierie, mais ils ont dévié de la voie idéale et emprunté divers
chemins, induits en erreur par leurs différentes connaissances…».
- L’écrivain et historien égyptien ‘abd al- ‘Azîm Ramadân, que Dieu lui fasse miséricorde, a dit dans la revue Octobre, n° 1510, Octobre 2005 :
« … Mais j’ai fini par être séduit par la
logique caractérisant le discours offert par le cheikh Adnan à son audience à
la mosquée al- Shûrâ. J’ai relevé chez ce monsieur de la circonspection et une
logique islamique authentique. Il se met, avec toutes ses facultés et tout ce
que Dieu lui a prodigué comme science, du côté de la vérité et contre l’intolérance.
Il n’était pas un simple prédicateur, mais un vrai savant, versé en sciences
islamiques. En outre, il est d’un savoir encyclopédique : il traite, en
effet, d’histoire comme il traite de religion ou de politique ! J’ai trouvé
en cheikh Adnane une lanterne qui éclaire pour ses auditeurs la voie de la vérité
et de la justice et qui les éloigne de l’égarement de la calomnie et du
fourvoiement… »
« C’est pour cela que j’ai trouvé nécessaire de
rendre hommage, dans cet article, à un éminent savant que j’ai écouté à Vienne,
le cheikh Adnan Ibrahim. J’espère que ses prêches seraient diffusés en Egypte
et dans le monde musulman »
- Le docteur Muhammad Munîr Sa‘d al- Dîn, président du centre scientifique de développement de la recherche et des études au Liban :
« … Les caractéristiques singulières qui vous caractérisent,
à savoir l’objectivité dans le jugement et vos prises de position du côté de la
vérité traduisent l’authenticité de vos sentiments et de votre pensée… votre intégrité,
votre confiance en vos capacités et votre conviction en ce que vous dites…
l’improvisation qui donne l’impression d’une préparation préalable de toute
intervention et la maîtrise complète de tous les points qu’il aborde…».
- D'autres savants et prédicateurs ont dit des choses semblables, tels qu'al-Muqri' al-Idrîssî, Târiq al-Suwaydân, Hasan ben Farhân al-Mâlikî...
A la recherche du bonheur
Au Nom de Dieu, le
Miséricordieux, le Tout-Miséricordieux. Louange à Dieu, et prière et
salutations sur notre Prophète Muhammad sws.
Chers frères, chères
sœurs ! S’adressant à Adam et à Eve, Dieu dit dans la sourate Taha « Qu’il
ne vous fasse pas sortir du Paradis car tu serais malheureux » (Coran,
Tâ- Hâ : 117). A l’opposé du malheur, il y a le bonheur. Le Coran a fait
mention de cette opposition dans d’autres versets: « Certains hommes
seront réprouvés, d’autres bienheureux » (Coran, Hûd :
106) ; « Pour ce qui est des réprouvés (…) Et quant aux
bienheureux… » (Coran, Hûd : 108).
Le Coran emploie un mot
précis comme antonyme du bonheur. Ce n’est pas l’affliction, ni la misère, ni
le désespoir, mais un seul terme qui recouvre toutes ces acceptions : à
savoir le malheur.
C’est pour cela que ce
terme est revenu souvent dans la bouche du Prophète sws. Ainsi, dit-il :
« Œuvrez, à chacun sera facilitée
l’œuvre pour laquelle il a été créé (…). Celui qui fait partie des gens du
bonheur accomplira les œuvres des gens du bonheur, et celui qui fait partie des
damnés commettra les œuvres des gens du malheur »[1].
Il dit aussi : « Il est un
bonheur pour l’homme que de faire la prière de la consultation et d’accepter ce
que Dieu lui a prédestiné. C’est un malheur pour l’homme que de délaisser la
prière de la consultation et de refuser ce que Dieu lui a prédestiné »[2].
Et selon Jâbir, le Prophète sws a dit : « Il est un bonheur pour l’homme que d’avoir une longue vie et d’être
guidé par Dieu vers le repentir »[3].
Il dit par ailleurs: « Il est
trois choses qui font partie du bonheur, et trois choses qui font partie du
malheur »[4].
La religion nous
enseigne que le champ sémantique du terme bonheur est large et renvoie autant
aux plaisirs matériels permis qu’aux plaisirs et joies psychiques et
spirituels. « Dis: «De la grâce de Dieu et de Sa miséricorde, c’est de
cela qu’ils doivent devraient se réjouir. Ceci est bien meilleur que tout
ce qu’ils amassent » (Coran, Yûnus : 58). Aussi, le Prophète sws
a dit que le jeûneur a deux joies comme rapporté par al-Bukhârî et Muslim. De
par Sa justice et Son équité, Dieu a fait de la satisfaction et de la certitude
une source de bonheur et de vie, et a fait de l’insatisfaction et du doute une
source de soucis et de malheur »[5].
C’est ainsi que nous
pouvons appréhender le caractère spirituel du bonheur. Etre heureux signifie
donc être un serviteur reconnaissant, et non pas quelqu’un d’ingrat envers les
bienfaits de Dieu. Car ne pas ressentir les dons que Dieu nous a accordés et
n’y éprouver aucun bonheur constitue une ingratitude.
Le bonheur est donc une
attitude et un état d’esprit qui renseignent sur le degré de perfection de la
foi et de maturité de la spiritualité. Dans une invocation prophétique, le
serviteur dit à son Seigneur : « Je reconnais les bienfaits dont Tu m'as gratifiés, et je reconnais mes
péchés ». En faisant cette invocation, le musulman reconnaît ne pas être digne de ces
larges dons, et admet ne les recevoir que par pure faveur du Donateur et
Généreux.
Malgré la grande
difficulté que nous éprouvons à définir le bonheur, je soutiens que chacun
d’entre nous en a une connaissance globale. Car quiconque en est privé peut
affirmer qu’il n’est pas heureux, quand bien même il serait incapable de dire
comment et par quels moyens il pourrait être heureux.
Le besoin de bonheur
n’est pas un besoin accessoire ou de divertissement, mais un besoin vital.
Aristote considérait le bonheur comme étant l’essence de la vie, le bien
suprême qu’il appela Eudaimonia. Il avançait que les humains aspiraient
au bonheur. Même ceux qui ambitionnent le pouvoir, l’autorité et la mainmise -
en recourant à la torture et à la cruauté-, aspirent en vérité au bonheur, mais
ils échouent dans leur quête du bon chemin qui y mène.
C’est le cas par
exemple de Napoléon. Après toutes les batailles sanglantes, les guerres
acharnées et les expansions, il nous apprend que, même s’il ne s’en rendait pas
compte dès le début, il aspirait au bonheur, et affirme avec douleur qu’il n’a
pas goûté au bonheur un seul instant.
Comme vous le savez, il
y a des milliers de traitements contre la calvitie. Mais, en même temps, il y a
cent-vingt-mille traitements pour soigner la dépression. A cet égard, la
majorité des gens font une erreur - commise auparavant par Sigmund Freud (1856
– 1939) - en prétendant que le bonheur et le malheur sont deux sentiments que
l’on peut représenter par une seule ligne limitée à ses deux extrémités :
moins on est malheureux, plus on devient heureux, et l’inverse. Cette théorie
s’est avérée inexacte car, en vérité, à chaque fois que l’on devient moins
malheureux, on est certes moins malheureux mais pas nécessairement plus
heureux. Le bonheur est donc un terme différent dans l’équation.
Le bonheur est une
expérience positive qui nous rend profonds, qui rend notre sourire plus large
et notre joie plus authentique. Il élargit notre horizon, stimule notre
créativité, augmente notre confiance. Il nous aide à mieux nous ouvrir à la
vie, nous rend plus sociables et plus épanouis. Il est connu que l’enfant rit
trois cents fois au moins par jour, alors que les adultes rient en moyenne une
vingtaine de fois.
Sigmund Freud était
quelqu’un de désespéré et de pessimiste. Concernant le sujet qui nous préoccupe,
il considérait que la recherche du bonheur était une entreprise vouée à
l’échec, motivée par le principe du plaisir, reliquat de l’enfance continuant à
habiter l’être, ne pouvant jamais se réaliser dans la réalité. Il disait :
« On est tenté d’affirmer que l’idée selon laquelle l’homme est appelé à
être heureux n’est pas incluse dans les plans de la création ». C’est pour cela qu’il reconnaissait
que le but de la psychanalyse était de maintenir la « misère
ordinaire ».
Le bonheur est-il à la
fois si important, caché et difficile ? C’est peut-être pour cette raison
que les philosophes, les intellectuels, les écrivains, les poètes, les
religions - qu’elles soient monothéistes ou non- et la psychologie se sont intéressés
et ont traité de la question du bonheur.
La
poétesse irakienne Nâzik al-Malâ’ika a dit :
Nous
cherchâmes le Bonheur mais…
Ne
trouvâmes point sa caverne envoutée
A jamais nous demandons aux nuits de ses
nouvelles….
Alors qu’il
est le secret de la vie et le mystère des temps
Aujourd’hui, il y a
toute une discipline appelée nouvelle science du bonheur dont les
recherches aboutissent à des résultats très intéressants. William James (1842 –
1910), l’un des fondateurs de la psychologie expérimentale et l’un des trois
piliers du pragmatisme, dit : « L’essence de toute religion et de toute
éthique consiste à savoir quel regard nous jetons et quel rapport nous
entretenons avec l’existence et la vie».
Mais qu’est-ce qui
domine aujourd’hui, le bonheur ou le malheur ? Aux USA, les dernières
statistiques rapportent que le nombre de suicides dépasse le nombre le nombre d’assassinats.
Selon l’OMS, la dépression constituera en 2020 la deuxième cause, après les
maladies cardiovasculaires, des « années perdues en incapacité de
travail ».
Pour vous épargner le
suspens, je vous donne le mot de la fin : Le bonheur est dans la foi. Mais
je parle ici du vrai sens de la foi. Non pas la foi théorique des livres, des
prêches, des rites, mais la foi de l’expérience, la foi du droit chemin dont
les étapes sont perpétuellement parcourues. Dieu swt dit dans le saint
Coran : « Si vous recevez de Moi une guidance, celui qui s’y
conformera ne s’égarera pas et ne sera point réprouvé » (Coran, Tâ-
Hâ : 123). Ce verset est une promesse de bonheur ! Dieu swt dit au
début de cette sourate : « Nous ne t’avons pas révélé le Coran
pour que tu sois malheureux » (Coran, Tâ- Hâ : 1).
Les savants évoquent
certaines causes spécifiques à même d’expliquer notre malheur. Nous serions
très sensibles aux côtés négatifs et aigres de la vie. D’un point de vue
sensitif, nous apprécions le sucré d’un aliment même s’il n’y est présent qu’à
un dosage de1/200, tandis que nous
goûtons l’aigre même s’il n’est présent qu’à hauteur de 1/2.000.000. Aussi,
sommes-nous beaucoup plus affectés par nos échecs que par nos réussites.
L’un des savants,
spécialiste dans la résolution des problèmes familiaux et conjugaux, soutient que
pour neutraliser une attitude négative commise par l’un des deux conjoints, il
faut fournir cinq fois plus d’efforts.
Par exemple, si le mari prononce un seul mot qui contrarie sa femme, il lui
faut cinq mots doux pour le contrebalancer et pour que l’eau coule à nouveau
sous les ponts. Une seule phrase négative nécessite cinq phrases positives etc.
Ceci montre la difficulté de rendre la vie conjugale heureuse.
Mais, par la grâce de
Dieu swt, le côté lumineux de l’histoire est que chacun d’entre nous naît muni,
non du désir de bonheur, mais du bonheur lui-même. L’homme commence donc au-dessus
de la moyenne. C’est pour cela que nous voyons que dès que l’enfant commence à
distinguer les visages, il se détourne des visages fades, vides de tout sentiment,
se tourne vers les visages radieux qui rayonnent de sentiments et réagit par
imitation : il répond immédiatement au sourire par un sourire ; puis
après dix mois par exemple, il tire sa langue si la personne lui tire la
langue. Aussi, il aime le goût sucré et répugne l’aigre.
Un autre point positif
est que nous avons la chance d’être munis d’un système appelé « Le système
d’immunité psychologique ». Par exemple : Une femme qui a épousé un
mari qui ronfle pendant son sommeil - chose qui la dérange énormément -, se
consolera en se disant qu’il a un cœur d’or. Un étudiant qui n’a pas réussi à
accéder à une université à laquelle il aspirait, réussira à intégrer une autre
pour laquelle il n’était pas enthousiaste et se dira : « Peut-être
est-ce mieux pour moi. Au moins les débouchés auxquels cette université me
prépare sont plus confortables et me permettront de disposer de plus de temps pour
ma famille ».
Ceci
nous rappelle ce sage poète qui dit en guise de consolation pour sa petite
taille
Si mes os ne sont pas
longs
Mes nobles mérites
les rallongeront
Ainsi je dépasserai
les gens de grande taille
Jusqu’à ce qu’il soit dit que je suis grand
Ainsi, tu peux changer
ton destin, non en changeant ce qui t’était prédestiné, mais en changeant ta
réaction à son égard, car, au final, ton destin est constitué de deux
parties : ce qui t’a été destiné, et ton attitude à son égard.
L’empereur et
philosophe romain Marcus Aurelius (180) disait : « Notre vie est le
produit de nos idées ».
Abû
al- Tayyib al- Mutanabbî a dit:
La peur n’est rien d'autre que
ce que l’on craint
La sécurité n’est rien d'autre que ce que l’on considère
sûr
William Shakespeare a
dit en substance que rien n’est bon en soi et rien n’est mauvais ;
rien n’est beau en soi et rien n’est laid : ce sont nos idées qui
façonnent cela. Les choses sont neutres, mais c’est nous qui leur donnons un
certain sens. Ce que dit Shakespeare est d’une profondeur qui n’est pas facile
à assimiler facilement par tout un chacun.
Dan Gilbert, un
psychologue de Harvard, a posé une question étrange : « Dans un an,
qu’est-ce qui t’aura procuré le plus de bonheur ?? Avoir gagné
quatre-cent millions d’euros, ou avoir subi un accident grave t’ayant cloué
dans une chaise roulante ? ». Il ne fait aucun doute que chacun d’entre
nous répondrait : « Avec quatre cent millions d’euros, le meilleur se
réalisera dans un an, et même dans cent ans ! ». Mais Gilbert nous
surprend en disant : « Faux ! Dans une année, celui qui a gagné
quatre cent millions d’euros et celui qui se déplace en chaise roulante auront
la même expérience du bonheur ». La raison de cela est qu'il est possible
de synthétiser le bonheur à partir des éléments et moyens disponibles s'il y a
une volonté et une conscience positive. Le bonheur est donc de nature
synthétique et émane de l'intérieur.
C'est nous même qui
détenons la capacité de projeter une sensation positive sur un évènement si
nous le voulons. Le Prophète sws n'a-t-il pas dit que Dieu swt éprouve les
gens, et que celui qui agrée cela mérite l'agrément de Dieu, tandis que celui
qui le refuse encourt le courroux de Dieu ?[6].
Combien de fois n'a-t-on pas entendu ce hadith et d'autres hadiths
semblables? La science nous permet
aujourd'hui de les appréhender sous un angle nouveau.
Un jour, le Prophète
sws rendit visite à un vieil homme abattu par la fièvre et lui dit en
guise de consolation: « Que ce soit une purification pour toi, si Dieu le
veut ». Mais le malheureux lui répondit : « C'est plutôt une
fièvre qui brûle un vieil homme, et qui finira par le jeter dans une
tombe ». Le Prophète sws ne put que répondre : « Qu'il en soit
ainsi donc ! »[7].
Il est de notoriété
publique que les savants et les médecins insistent sur le grand rôle que jouent
le bon moral et l'espoir dans la guérison des malades et le rétablissement
rapide. Dans une expérience effectuée sur des patients en période de
convalescence postopératoire, un groupe a été placé dans des chambres dont les
murs ne donnent aucune vue du monde environnant, et un autre groupe a été mis
dans des pièces offrant une vue sur un paysage pittoresque. Les résultats de
l'expérience ont montré que les patients du deuxième groupe ont guéri plus
vite. Un exemple de biophilie est donné ici, à savoir recevoir le monde avec un
esprit d’amour, de fusion et avec un sentiment de proximité et de chaleur.
Celui donc qui se
montre satisfait mérite l'agrément du Seigneur, tandis que celui qui s'en
refuse encourt le courroux divin. « Il en
est parmi les Bédouins qui considèrent ce qu’ils ont dépensé (en aumône prescrite
ou non) comme une charge onéreuse, et qui guettent vos revers de fortune. Qu’ils
en soient eux-mêmes victimes! Dieu est Audient et Omniscient » (al-
Tawba : 98). Ces bédouins donnaient l'aumône en ronchonnant et en étant renfrognés,
méritant pour cela le courroux de Dieu et le malheur, à l'inverse d'un autre
groupe de bédouins : « qui croient en Dieu et au Jour dernier et
qui considèrent ce qu’ils ont dépensé comme autant de moyens de se rapprocher
de Dieu et [d’obtenir] des invocations du Messager. Ces aumônes ne sont-elles
pas un réel un moyen de s’en rapprocher ? Dieu les fera bénéficier de Sa
miséricorde, car Il est Tout de Pardon et de Miséricorde » (al-
Tawba : 99). Ainsi, les deux groupes ont fait des dépenses, mais le
dernier groupe a gagné l'agrément du Seigneur tandis que le premier a récolté
Sa colère.
Le poète Ilya Abû Mâdî
disait :
Ô le plaignant qui ne
souffre d’aucun mal
Que feras-tu quand tu
tomberas malade ?
Il n’y a pas de pires
injustes sur terre
Que ces âmes qui
aspirent au départ avant son terme
Qui voient les épines
des fleurs et s’aveuglent
De voir les bouquets
de rosée qui se forment autour d’elles
Celui dont l’âme est
démunie de beauté
Ne perçoit aucune beauté dans ce monde
Ô toi le plaignant qui en vérité ne
souffre d’aucun mal
Sois
beau, tu t'apercevras que l'univers est beau
Lorsqu’à la fin de sa vie, ‘Abdullâh ibn ‘Abbâs
perdit la vue, il ne pesta pas contre son destin et ne considéra même pas qu’il
était atteint par une calamité. Il dit :
Si Dieu prive mes yeux de leur
lumière
Dans ma langue et mon ouïe il est
une lumière
Mon cœur est intelligent et ma
raison ne souffre d’aucune défaillance
Et dans ma bouche il
y a un tranchant aussi affilé qu’une épée
Pareillement, Bashshâr
ibn Burd, ce poète aveugle, a écrit deux vers magnifiques dans lesquels il
dit :
Fœtus, je fus déjà
aveugle
Mon intelligence
naquit de ma cécité
La lumière de mes
yeux fléchit pour me nourrir de science
Mon cœur la récolte quand les gens la perdent
Un jour, un persifleur le taxa
d'aveugle, Bashshâr lui répondit en disant :
Les ennemis me
dénigrent alors qu'en vérité ce sont eux les tarés
Il n’est point de honte qu’on me taxe d’aveugle
Quand l’homme observe
la bravoure et la piété
Il n’est plus aveugle
même s’il perd la vue des yeux
Je trouve en la cécité récompense, provision et
préservation
Or combien n’ai-je
pas besoin de ces trois choses
C’est
de cette manière que fonctionne le système psychologique immunitaire. Il
réinterprète la catastrophe et la formule en bienfait, comme le dit ce poète
connaisseur de Dieu :
Dieu peut faire don
d’épreuves quand bien même elles sont grandes
Et Il éprouve certaines personnes en les gratifiant
de faveurs
En usant de la même
logique, nous réinterprétons le noble verset : « Le combat vous a
été prescrit alors qu’il vous est désagréable. Or, il se peut que vous ayez de
l’aversion pour une chose alors qu’elle vous est un bien. Et il se peut que
vous aimiez une chose alors qu’elle vous est mauvaise. C’est Dieu qui sait,
alors que vous ne savez pas » (Coran, al- Baqara : 216).
J'ai dit une fois dans
le cours d'exégèse qu’il est très dangereux d’avoir une confiance totale en soi-même,
que l'on soit un individu ou un groupe. C'est une promesse de calamités s'abattant
sur les autres, voire sur soi-même. Être empreint de ce type de confiance, c'est être convaincu que tout est ficelé d’une façon si parfaite qu’aucune
probabilité d'erreur ne peut être envisagée. De ce type de confiance résulte que parfois les gens s'entretuent, brisent leurs familles, abandonnent les
êtres qui leur sont les plus chers, et prennent des décisions qui, après coup,
s'avèrent folles et égoïstes. Le croyant fort est humble. Le secret de sa force
réside dans son sentiment d'être faible et d’avoir constamment besoin de la
guidance de Dieu. D'où les invocations, la prière de consultation et la
consultation des autres. Le musulman sait que le bien peut être caché, flou ou
se confondre avec le mal, Dieu swt dit :
« Et si Dieu hâtait le malheur des gens avec autant de hâte
qu’ils cherchent le bonheur, le terme de leur vie aurait été décrété »
(Coran, Yûnus : 11).
« Si vous avez de
l’aversion envers elles durant la vie commune, il se peut que vous ayez de
l’aversion pour une chose alors que Dieu aura placé en elle un bien
considérable » (Coran, al- Nisâ' : 19).
Dieu swt nous apprend à
ne pas toujours nous contenter de notre raison et de nos calculs. En effet, nos
calculs sont régis par l’équation du hollandais Daniel Bernoulli (1700 ـ 1782), selon
laquelle : la valeur attendue est égale au produit de (la probabilité de
l’évènement) et de (la valeur de l’évènement). Cette équation est pertinente à
bien des égards :
Prenons un jeu de pile
ou face. Quand on tombe sur « pile », on gagne 10 €. L’avis de la
religion sur le sujet mis à part, miseras-tu 4 € pour jouer ? Selon
l’équation de Bernoulli, la probabilité de gain est de ½, tandis que la valeur
du gain est de 10 €. La valeur attendue est donc de 5€. Puisque la mise n’est
que de 4 €, de toute évidence tu joueras !
D’aucuns prétendent
préférer ce bas monde à l’au-delà, la vie étant une chose garantie et
disponible ici et maintenant, tandis que pour l’au-delà, on ne sait
jamais ! Mais en nous inspirant de l’équation de Bernoulli, nous pouvons questionner
la valeur du confort matériel. Multiplions la valeur du gain, par exemple une
voiture qui coûterait un million d’euros, par la probabilité du gain qu’on
estimera à 100%. La valeur attendue est donc une voiture qui coûte un million
d’euros. A l’inverse, quelle est la valeur attendue de l’au-delà ? Disons
que la probabilité d’existence de l’au-delà est de 50%, qu’on multipliera par
la valeur du gain, à savoir un Paradis éternel. D’un point de vue mathématique
et selon Bernoulli, la valeur attendue ne peut être fixée en se basant
seulement sur la probabilité de l’évènement, sa valeur doit être prise en
compte, et il s’agit ici d’un Paradis d’une valeur infinie.
En outre, on a
mentionné que les systèmes biologiques humains fonctionnaient de manière
fragmentée, et parfois antagoniste. Par exemple, nos gènes n’ont que faire de notre
bonheur ou de notre malheur, ce qui leur importe est de se transmettre à la
génération suivante. C’est pour cela qu’ils nous mènent à goûter au plaisir,
à l’amour, et enfin à une relation durable à travers le mariage. Le problème est
que ces trois éléments ne fonctionnent pas toujours de manière harmonieuse,
dans le sens où il est possible que certains aiment rester époux d’unetelle afin
d’avoir des enfants légitimes avec elle, mais préfèrent en même temps assouvir leur
désir avec une autre, et vivre de manière romantique avec une troisième. Je
suis sûr que celui qui a proposé cette théorie s’est inspiré de Demosthenes
(388 – 322 Av. JC) qui a dit : « Nous prenons des prostituées pour
assouvir notre appétit sexuel, des maitresses pour préserver notre corps, et
des épouses pour nous donner des enfants légitimes ».
Du reste, l’expérience
montre que lorsque l’homme choisit quelque chose et qu’il parvient à la posséder,
l’évaluation qu’il en fait change. On serait tenté de dire : Cela est
normal et participe du fonctionnement du système immunitaire psychologique. Mais
les choses sont plus profondes que cela. En quoi ?
Dans une expérience
classique en psychologique, qui date d’une cinquantaine d’années, il est
demandé aux participants de classer des tableaux par ordre décroissant de
beauté. Puis, il leur est annoncé qu’ils ont droit à un tableau comme cadeau,
qu’ils le recevront par la poste, mais que seuls les troisième et quatrième
tableaux - selon le classement qu’ils ont fait- sont disponibles en stock. La
plupart des participants choisissent le troisième tableau. Après cela, ils sont
séparés en deux groupes : il est dit au premier groupe : « Une
fois votre choix fait, vous n’aurez plus la possibilité de changer
d’avis ». Au deuxième groupe, il sera dit : « Vous avez quatre
jours pour éventuellement changer d’avis et choisir un autre tableau ».
Après cela, il est demandé aux deux groupes de réévaluer les six tableaux
originaux. Les résultats de l’expérience montrent un changement de l’évaluation
effectuée par le premier groupe : le troisième tableau redevient leur préféré,
tandis que rien ne change pour le deuxième groupe. En fait, le système motivant
la production de ce qu’on appelle le bonheur créé n’a pas été
activé dans le cas du deuxième groupe, car les participants n’ont pas encore fait
leur choix.
Il y a quelques années,
Daniel Gilbert réalisa cette expérience sur un groupe de patients souffrant
d’amnésie antérograde. Gilbert demanda à ces patients de classer les tableaux,
ce qu’ils firent, puis il leur dit qu’ils avaient droit au troisième ou au quatrième
tableau et il les remercia en disant qu’ils recevraient le tableau qu’ils avaient
choisi par voie postale. Les expérimentateurs quittèrent la pièce avec leur
matériel. Dix minutes plus tard, ils revenaient dans la pièce d’expérimentation
et, discutant avec les patients, ils remarquaient que ces derniers ne se
rappelaient de rien du tout. L’expérience fut reconduite une deuxième fois, et
ce qui fut surprenant, voire choquant, c’est que le tableau qu’ils avaient
choisi dans la première expérience pour qu’il leur soit envoyé, fut mis à la
tête des choix dans le nouveau classement. Ceci signifie que les patients n’ont
pas consciemment décidé de changer leur évaluation. Ce qui s’est produit est ce
qu’on appelle une réaction affective esthétique.
Cela ne confirme-t-il
pas que le croyant est capable de voir le bien dans toute chose qui lui
arrive ? Et ce, en voyant sous un angle spécifique, denrée rare sauf chez
les croyants, conformément à la parole prophétique : « Etonnant
vraiment est le cas du croyant ! Tout ce qui lui advient est bénéfique et
seul le croyant a ce privilège : quand un bonheur lui arrive, il rend
grâce et ceci est un bien pour lui ; et quand un malheur le frappe, il
s’arme de patience et c'est aussi un bien pour lui »[8] ?
[1] Rapporté par Muslim.
[2] Recensé dans le Musnad d’al-
Bazzâr.
[3] Dans le Musnad d’al- Bazzâr, et
al-Mustadrak d’al-Hâkim,
[4] Rapporté par al-Hâkim
entre autres.
[5]
Rapporté par al- Bayhaqî
dans al- Shu‘ab, al- Tabarânî dans al- Kabîr, al-Hakîm al-
Tirmidhî, et Abû Nu‘aym dans al- Hilya.
[7] Rapporté par al- Bukhârî dans
al- Adab al- Mufrad d'aprés Ibn 'Abbâs.
[8] Rapporté par Ahmad, Muslim, al-
Dârimî et Ibn Hibbân d’après Suhayb.
Inscription à :
Articles (Atom)